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L'art de la nouvelle

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L'art de la nouvelle Empty L'art de la nouvelle

Message par Admin Lun 20 Oct - 19:45

Admin a écrit:de Marc Durin-Valois, en préface du livre "les Bienheureux" présenté au Prix Fondcombe 2014 par Patryck Froissart
Avec l'aimable autorisation de Patryck

Écrire des nouvelles est un art compliqué. L’histoire de ce genre littéraire est néanmoins ponctuée de splendeurs. Mais à vouloir faire
court, on longe un précipice, celui de la caricature. Une des explications de la bouderie actuelle du public pour le genre tient au fait que certains écrivains ont pensé que produire une série de dix nouvelles sur quinze pages était plus aisé que de développer un roman sur cent cinquante. Un peu comme si le cent mètres exigeait moins d’efforts que la course de fond au motif que la distance était plus courte. D’où des tentatives qui ont lassé des lecteurs souvent bien disposés mais égarés dans des machins littéraires peu convaincants. Car la nouvelle a ceci de particulier qu’elle est l’art de l’inachevé. Chacune de ses séquences, je dirai même chacune de ses phrases, doit ouvrir sur un espace littéraire qui n’existe pas, qui n’est jamais écrit mais qui se dessine en filigrane dans l’esprit du liseur. L’exercice est d’autant plus subtil que ce champ – en quelque sorte l’ombre portée du texte – ne s’approche pas à travers un vocabulaire flou, indécis. Ce serait trop facile. C’est la précision du propos, la finesse de la trame qui libère cet espace. La nouvelle est donc le départ de quelque chose, jamais un aboutissement. Sa dernière phrase ne referme pas un texte, elle l’ouvre en indiquant une orientation pour errer dans un imaginaire qu’elle fait émerger à travers le fil invisible qui traverse le recueil. Car c’est là l’autre difficulté de la chose : une nouvelle ne se suffit pas à elle-même. Elle tisse des liens secrets, suscite des résonances puissantes avec les autres récits du même opus. En ce sens, non seulement elle ne duplique pas la construction littéraire sur des formats courts mais elle l’inverse et la refaçonne. Dans « Les bienheureux », Patryck Froissart nous en livre une démonstration foisonnante. Les femmes y dévorent les hommes avec un sourire doux, amusé et sensuel. Toutes dialoguent entre elles, d’une histoire à l’autre, dans un dialogue qui n’est jamais écrit, ou même évoqué. Au gré des lecteurs, l’une ou l’autre image de ces diaboliques s’imposera plus fortement. Mais celles des deux filles malicieuses du garagiste envoyant les automobilistes ad patres, de la sublime domestique Indranee posant son pied sur le dos d’un cadre français fasciné, ou encore celle, lancinante de Stéphanie, vampirisant le talent d’un écrivain en lui offrant en échange ses seins à lécher, n’ont pas fini de nous hanter.
Marc Durin-Valois

Marc Durin-Valois figure parmi les romanciers inscrits dans une littérature française ouverte sur le monde et notamment les États-Unis et l’Afrique où l’auteur a passé sa jeunesse. Il est notamment l’auteur de « L’Empire des solitudes » (JC Lattès), Prix de la Rochefoucauld, de « Chamelle » (JC Lattès), Prix National des Bibliothèques et Prix de la Francophonie, porté au cinéma par la réalisatrice Marion Hansel, et de « La dernière nuit de Claude Eatherly » (Plon), paru lors de la dernière rentrée littéraire.
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Message par eeymard Mar 21 Oct - 20:32

La nouvelle n’est pas qu’une histoire courte même si elle réduit un récit à l’essentiel.
Sa brièveté augmente l’intensité de l’effet recherché et ne permet pas une lecture brisée, comme celle du roman.
Sa lecture s’accomplit tout d’une haleine.
On ne doit rien y trouver d’inutile, tout y est plus suggéré que détaillé. La phrase elle-même est dégraissée.
Le lecteur y perd sa liberté, c’est l’écrivain qui le prend en main dès la première phrase pour l’amener à une chute imprévisible, en combinant les événements les plus propices à amener l’effet voulu.
Dès la première phrase, un fil conducteur invisible va conduire inexorablement le lecteur, sans lâcher prise, à l’aboutissement du récit, de manière à parfaire le dessein prémédité.
Une nouvelle manquée est celle qui laisse le lecteur sur sa faim.
L’auteur régule le temps, donne la densité au récit et sa juste taille pour captiver le lecteur, sans lui laisser perdre le moindre mot.
Il doit dire beaucoup avec peu, économiser l’espace  nécessaire à la description et au dialogue, équilibrer les différentes parties qui composent le récit.
Il veille à refreiner tout désir, toute complaisance, que suppose le plaisir de diluer la phrase par des images ou des pensées qu’il estime plaisantes, mais sans apport efficace et même dissonances à l’exigence d’unité de la composition du récit.
Tout cela étant respecté, aucune nouvelle n’est possible sans cette chose mystérieuse nommée « imagination », faculté inexplicable qui perçoit  les rapports intimes et secrets des choses, les correspondances et les analogies.
 
Emile Eymard (auteur de « Le bois vert et la cendre »)
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Message par dhallepee Mar 21 Oct - 20:44

Bravo !

Emile Eymard maîtrise l'art de la nouvelle comme en atteste son recueil "Le bois vert et la cendre" présenté au prix Fondcombe 2014
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